Phylogénie

Je choisis un objet que je fabrique en verre pour le photographier, je ne souhaite pas montrer celui-ci, il doit rester dans la boite noire, je souhaite n’en montrer qu’un point de vue sculpté par la lumière comme on apercevrait un rocher en mer sans être sûr de l’avoir bien vu, sans savoir exactement ce que l’on regarde.

Il y a quelques années, j’ai vécu une sidération esthétique lors d’un voyage de 4 jours en voilier avec un ami, créateur de l’atelier de verriers que j’occupe à Paris. La nuit était très pure, le ciel incroyablement lumineux et la surface de l’océan, profonde et impressionnante. Les lumières sculptaient les vagues avec une douceur précise. J’avais physiquement l’impression que ma peau devenait une extension de cette surface. Mes premières photographies sont apparues quelque temps après ; avec du recul, il me semble évident qu’une partie de l’inspiration s’est nourrie de cette émotion.

Je suis fascinée par ce qui se transforme par pression, compression, fusion, par la manière dont les matières terrestres et dans l’espace se créent. Je nourris des passions pour l’astrophysique, l’astronomie et la géologie. Grâce à ma présence dans un atelier de verrier, j’ai pu apprendre les techniques de moulage, de l’empreinte, à la cire perdue en passant par le plâtre puis la cuisson à 1000°. Ici nous sommes proches de la température de la lave.

Phylogénie 1 est née de ma rencontre avec Nicolas Goudemand, chercheur à l’Institut de Génomique Fonctionnelle de Lyon et spécialiste des conodontes. Il s’agit d’organismes aquatiques dont les dents fossilisées, de l’ordre du millimètre, constituent un outil de datation. L’étude de ces patrons de variation permet d’appréhender et de connaître l’âge de la roche. En grossissant des milliers de fois la taille du modèle de base, je souhaitais faire d’un outil qui sert à dater le paysage un paysage lui-même.

Phylogénie 1, collaboration photographique, Flora Fanzutti, collaboration scientifique Nicolas Goudemand,
collaboration maitre verrier Anaëlle Pann